Sessions #4 & 5
Au fil de l’eau
20/07/2023 & 10/08/2023
« Empty your mind, be formless. Shapeless, like water. If you put water into a cup, it becomes the cup. You put water into a bottle and it becomes the bottle. You put it in a teapot, it becomes the teapot. Now, water can flow or it can crash. Be water, my friend. »
« Fais le vide dans ton esprit, sois informe comme l’eau. Quand on met de l’eau dans une tasse, elle devient la tasse. Quand on met de l’eau dans une bouteille, elle devient la bouteille. Quand on met de l’eau dans une théière, elle devient la théière. L’eau peut s’écouler sereinement ou avec fracas. Sois comme l’eau mon ami. »
Bruce Lee
Qui s’intéresse à Bruce Lee tombera tôt ou tard sur ces mots qu’il a prononcés en 1971 à Hong-kong dans une interview qu’il donna au journaliste Pierre Berton lors d’un épisode de l’émission The Pierre Berton Show. Des mots qui se sont envolés de ses lèvres pendant seulement près de trente secondes d’une entrevue qui dura vingt-cinq minutes, et qui sont devenus cultes, et à raison. Cette citation et l’utilisation de l’eau comme métaphore à l’idée d’adaptabilité et de flexibilité nous permet de comprendre une philosophie de vie, mais également une philosophie martiale qui guida ses pas. C’est ce cheminement philosophique qui a conduit Bruce Lee à créer un concept martial s’inspirant de plusieurs disciplines qu’il baptisa « Jeet Kune Do » (« voie du poing qui intercepte »). Bruce Lee était un philosophe dans l’âme. Il a d’ailleurs étudié la philosophie à l’université de Washington, une matière que Danilo a également étudiée durant quatre années. Cette dimension philosophique et spirituelle que l’on retrouve dans de nombreux arts martiaux et dans le taoïsme (doctrine philosophique chinoise) habitait totalement Bruce Lee et on l’aperçoit clairement dans certains écrits interprétés par Danilo dans son spectacle.
L’élément liquide apparait plusieurs fois dans LEER et en retour, j’ai voulu l’intégrer dans le travail que j’effectuais avec Danilo. En juillet et août 2023, nous nous sommes rencontrés à deux reprises aux abords du canal Saint-Martin à Paris pour continuer à approfondir notre précédent entretien, parler de nos projets respectifs et bien sûr, prendre quelques photos. Les clichés de ces shootings au fil de l’eau constituent un puits de lumière dans cette série dominée par des prises de vues en intérieur.
Afin de créer une continuité visuelle, Danilo et moi avions convenu qu’il viendrait habillé d’une des tenues qu’il portait durant la première session (et qu’il porte d’ailleurs lorsqu’il joue son spectacle). Si certains costumes ressemblent à des vêtements portés par Bruce Lee, ils ont également un rôle pratique, symbolique et narratif à jouer dans LEER. Pour reprendre ses mots :
« J’ai tout de même une idée, c’est une sorte de long striptease ce spectacle. […]
Il avait un certain goût pour la mode Bruce Lee. Il était assez élégant, il choisissait bien ses vêtements. Il était assez classe. J’essaye d’avoir un compromis entre quelque chose d’un peu habillé et de simplement, je dirais, lambda. Au départ, je dois être un peu neutre parce que je suis un peu à la place du lecteur, donc je ne suis personne entre guillemets et en même temps je voudrais être un peu habillé, avec un soin du détail, mais je n’ai pas encore trouvé exactement la bonne tenue. Je sais qu’il faut que j’aie des couches (de vêtements), car il faut que je les enlève au fur et à mesure. Je m’apprête, mais c’est artisanal. Et puis, il y’a aussi le fait que je dois danser avec tout ça, me rouler par terre, donc je ne peux pas mettre du Gucci. Toujours est-il que j’ai pensé à l’éventualité de me saper comme sur certains clichés que j’ai pu voir où il avait un pantalon un peu près du corps avec une ceinture à boucle et des chemises un peu pelle à tarte, mais classe, classe. »
Après m’avoir dit que LEER serait en stand-by durant la période estivale, Danilo m’annonça finalement, lors de notre session du 10 août, qu’il jouerait son spectacle une nouvelle fois en septembre.